Informez vous et faites passer
Quand le soleil commande, agir peu. René Char
LE MONDE DE PHILIPPE
Décembre 2011 | ||||||||||
L | M | M | J | V | S | D | ||||
1 | 2 | 3 | 4 | |||||||
5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | ||||
12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 | ||||
19 | 20 | 21 | 22 | 23 | 24 | 25 | ||||
26 | 27 | 28 | 29 | 30 | 31 | |||||
|
La chaleur, toujours.
Bonhomme aime çà, la chaleur. Ce soir, il sait qu’il ira voir les étoiles. Il regardera sous la jupe du ciel et il verra des milliards d’étoiles. De sa table, il se tourne vers la gauche. Il
regarde vers la fenêtre. Il ne regarde pas, il considère. La lumière du soleil quitte le traversier. Il est temps de quitter le bureau. Il est déjà ailleurs mais il ne s’en doute pas. Il ferme
les yeux. Les fenêtres baillent en laissant pénétrer des vagues de douceur. La douceur finalement, peut être sèche. Une affiche collée au scotch s’est détachée. « C’était Armand et la cabane
du temps qui passe ». Son temps s’est arrêté, le temps lui, continue sa tournée d’été.
Chaleur. L’orage qui s’annonçait hier se
précise. Il tourne autour, se demande si çà va, que c’est le bon endroit et tout et puis quand il voudra. L’eau manque se dit bonhomme. Hier c’était les frissons, aujourd’hui c’est la douceur.
Tout est pareil, mais tout est différent. Les jours se poussent sans se bousculer, ils prennent leur temps, y sont longs. Les fenêtres sont toujours ouvertes, c’est par là que çà vient. Bonhomme
en est sûr. Faut pas attendre, faut juste que çà puisse venir et puis c’est là sans qu’on l’ait vu, sans qu’on y croit. Faut pas croire, juste comprendre et accepter.
Chaleur. Pénombre autour du bureau. Les deux fenêtres embrassent, béantes. Dehors, sur les traversiers, l’herbe est desséchée. Le soleil en écrase.
Bonhomme est devant l’écran de l’ordinateur. Il somnole, il se réveille par à-coups. La musique coule à travers les enceintes : « The rose with the brocken neck », Danger Mousse et Danielle Luppi puis Electric Mop, Rumba one. Vient un Bonheur. Il s’ondule en frissons sur les épaules, le dos. Le voilà qui pleure. Bonheur enlace Bonhomme par le torse et comprime en douceur sur les côtes. Le ventre exprime l’indicible, semblable, quand il étreint un sentiment au bord des quais. Les tempes battent imperceptiblement. Elles résonnent jusqu’au fond de la tête, comme les membrures souples des baffles. L’esprit se ballade, comme en été, léger.
La reine a des morpions. Voilà une nouvelle qui devrait satisfaire les ribaudes et leurs compères. Rires gras pour qui prendra là son argent comptant devant le JT, oublieux pendant ce temps de la farce qui continue et des tristes mesures qui les accableront tandis qu'ils n'y prettent pas plus d'attention qu'un aveugle à un jeu de ballon.
Le foot on s'en fout. Le p'tit vieux d'à côté racontait ce matin sa retraite. Le cul sur un cageot à l'entrée de sa cave ouverte. Ses pauvres mains qui ont façoné les murs et les crépis, soulevé les pierres et les tuiles, tandis que le dos ployait à rompre tout au long de sa vie de maçon. Et puis ses jambes...T'as vu sa tête aussi?
C'est plus un papet, c'est une douleur quand il rigole. Alors on voyait sa bouche édentée quand il disait sa retraite, qu'on achèterait pas avec deux maillots et trois paires de chaussures à crampons comme celles des gamins footeux au cul cousus d'orgueil et de pognon.
Parait qu'elle était bien cette retraite. Maintenant qu'on y tripote, on ne doute pas non plus qu'elle sera encore mieux. Tandis que les pierres continueront de peser sur les grimaces des vieux maçons.
Qu'on leur envoie pour jouer un ballon en pierre de rivière et qu'il chantent, plutôt qu'en petits coqs mal élevés, comme le papet ce matin, l'oeil rigolard et allumé, un vieux "bella ciao..."
Je me suis penché et j’ai vu un petit bracelet fait de cordelettes. C’est un bracelet à la mode « marine », constitué d‘une succession de nœuds patiemment répétés. Il est bleu et blanc. Je l’ai ramassé sur le sable. Sur le sable de la plage de la baie des anges, c’était à la baie des anges, comment te dire l’ange ? Comment te dire mon ange si tu te reconnais, ou plutôt si tu le reconnais, ce bracelet ? Car nul doute pour moi, c’est bien le bracelet d’un ange que j’ai trouvé là. J’ai hésité, je me dois de le préciser. J’ai hésité oui, avant de le mettre à mon poignet. Je l’ai gardé longtemps dans ma poche. Je l’ai serré dans ma main, jusqu’à ce que je finisse par me convaincre que tu ne m’en voudrai pas. Après tout tu es un ange et tu sais bien de quel sucre je suis fait, de celui, qui lorsqu’il coule, on fait les larmes, sucrées, salées, comme les parfums de la plage de la baie des anges à l’Aberwrac’h. Peut être viendras tu une nuit me le reprendre. Je dormirai, et je sentirai juste un souffle léger, un arôme où se côtoient mer et montagne. La mer que tu survoles et la montagne que je gravis. Tu te pencheras, tu hésiteras et tu finiras par te convaincre que je ne t’en voudrai pas, après tout, tu es un ange...
fleurs et tomates